Et vous passerez comme des vents fous

C’est l’été dans les Pyrénées. Gaspard, berger solitaire, a conduit ses brebis sur l’estive. Tourmenté par la mort tragique d’une jeune bergère survenue l’année précédente, il se pose des questions sur son activité pastorale. Il croise le chemin d’une éthologue, surnommée « la fille-aux-ours. » Alma suit pas à pas, obstinément, la réintroduction des ursidés dans ce coin de montagne, persuadée qu’une meilleure connaissance du comportement des ours est nécessaire à la cohabitation. Au grand dam des villageois de la vallée pour qui l’ours exerce encore et toujours « un mélange de fascination et de peurs archaïques, … en plus de la haine. » En effet le retour du grand plantigrade n’est pas sans conséquence et ses attaques contre les troupeaux provoquent de vives tensions. Les vies parallèles de Gaspard et d’Alma sont mêlées à l’animal dans une nature vivante et fragile, violente parfois, avec « ses forêts-cathédrales, ses orages théâtraux, le spectacle pyrotechnique de ses éclairs. » « Le démontagnage » ne sera pas facile pour ces deux-là. Comment « quitter cet océan d’altitude, cesser de penser brebis pour penser humain ?« 

Chaque personnage trouve sa place à tour de rôle dans les chapitres de ce livre dense et fascinant où Jules, le troisième protagoniste, a toute son importance. Né en 1867 dans la maison que Gaspard a achetée, il capture une toute jeune oursonne, l’éduque pour en faire une bête de foire qu’il exhibe jusqu’en Amérique. L’histoire du saltimbanque Jules, dont l’ourse pathétique est l’antithèse de notre ourse indomptable (et contemporaine), retentit intensément avec le présent.

Le roman de Clara Arnaud, exigeant et fort riche, distille un suspense très habile. Bien documenté, il livre une foule d’informations sur les ursidés, sur les métiers de berger, d’éthologue, de montreur d’ours et surtout sur les grands espaces montagnards. Le livre chante les beautés d’une nature broyant parfois des destins, et incitant toujours à l’humilité.

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